dimanche 2 août 2015

La Procrastination

C’est cela mon problème, depuis des mois, voire des années, et dans les derniers mois, c’est également – entre autres, la raison pour laquelle je n’ai pas écrit d’articles depuis un bon moment, et je m’en excuse. Je ne vais pas dire que je vais mieux sur ce point, ni sur aucun autre en fait, parce que ce serait en grande partie faux. Je suis fatigué, mais moins, j’ai du mal à penser, mais moins, et je procrastine, mais moins. Un tout petit peu moins. Jusque-là, pas vraiment de quoi faire un article entier. Et pourtant.
Ma principale découverte date de ces derniers jours. Tout au plus une semaine. Mais je vais d’abord vous replacer dans le contexte exact de ce qu’était ma procrastination, parce que ce mot est un peu vague et qu’il recouvre, comme beaucoup de mots, plusieurs réalités.
Remettre à plus tard ce que l’on pourrait faire au moment-même, c’est cela, procrastiner ; pourtant, il y a plusieurs causes à la procrastination, et je crois profondément que des causes suffisamment distinctes entraînent parfois une différence de nature entre leurs deux conséquences, qui pourtant sont perçues, de l’extérieur et avec un peu de distance, comme identiques. Moi-même, je croyais que la raison pour laquelle je procrastinais était tout simplement le fait que j’étais un flemmard. Mais en réalité je ne crois pas l’être tant que cela. Les faits sont les suivants : je fais les choses obligatoires, mais je fais le minimum possible et le plus tard possible, si elles ne m’intéressent pas ; si elles m’intéressent, je les fais consciencieusement, minutieusement, même.
Dans le premier cas, on pourrait dire que je procrastine par désintérêt, par désir de ne pas perdre mon temps à des choses dont j’ai l’impression qu’elles ne me servent à rien. C’est probablement ce que l’on appelle communément la flemme. Quoi qu’il en soit, je sais tout de même gérer plus ou moins bien ce type de procrastination. Je peux par exemple me rendre compte que reporter la réalisation d’une tâche m’apporte plus de souffrances que de l’effectuer sur le moment. Pour les devoirs, par exemple, je sais que si je ne les fais pas, il en résultera un manque de compréhension du cours, une mauvaise appréciation du professeur, un sentiment de honte très puissant, et d’autres choses de ce genre. Cela se gère, donc. Même si ce n’est pas forcément simple.
Mais le second cas me semble plus intéressant. Je ne faisais pas mes devoirs de français (alors que la littérature est pour moi une passion), de physique (ce dont je veux faire mon métier), ou de philosophie (ce qui est mon mode de pensée) avant tard la veille du jour où il fallait les rendre, et je pensais que c’était dû au même phénomène que dans le premier cas : j’avais la flemme, je préférais faire autre chose, quelque chose de plus confortable, qui me demandait moins d’efforts, en somme. Mais je me trompais en partie : en fait, je ne ressens pas du tout la même chose quand je n’ai pas fait un exercice de maths (qui me tient moins à cœur que la physique) que de physique. Pour quelle raison ? Précisément parce que les trois disciplines du français, de la philosophie et de la physique sont les domaines dans lesquels j’investis le plus de moi-même, et rendre un devoir que j’ai moi-même fait, c’est de toute évidence me soumettre au jugement d’une personne qualifiée en la matière, qui est capable de briser, en quelques traits de stylo rouge, tout espoir d’avoir un jour de la valeur dans ces domaines qui me sont chers. J’ai peur que mes professeurs me disent que je suis incompétent, alors faire leurs devoirs me terrifie, parce que ça me rend vulnérable, alors le seul moyen que j’ai trouvé pour surmonter cette angoisse, c’est d’être perfectionniste. Cela demande une quantité assez phénoménale de temps et d’efforts, d’être perfectionniste – en tout cas dans ma tête – alors forcément, lorsque je pense à commencer un devoir, je me trouve bien plus à l’aise sous ma couette à surfer sur internet. C’est tellement plus facile.
Pourtant, tout est dans ma tête. Je sais depuis un certain temps que je me mets la barre tellement haut, parfois, que je peux me permettre de ne pas atteindre cet objectif et avoir un résultat reconnu de mes professeurs tout de même. La peur de leur jugement est presque entièrement irrationnelle. Je me fabrique mon propre obstacle, et je m’en rends compte une fois que je commence : dès que je me lance, c’est parti, et on ne peut plus m’arrêter. Il m’arrivait la même chose avec l’écriture (littéraire ou d’articles) : j’ai tellement peur qu’on juge négativement ce que j’écris que ça m’inhibe, et que j’ai beaucoup, beaucoup de mal à m’y mettre. Mais j’y prends pourtant énormément de plaisir, et je le sais. Je sais que c’est mieux que de passer des journées à me morfondre sur internet ou sur un jeu vidéo. Et pourtant ça me fait souffrir. Le fond de la question était de découvrir que c’était de commencer qui me faisait souffrir, et pas de faire réellement. Et de comprendre pourquoi ça faisait mal. Maintenant je peux me battre.

Et conclure.

Si vous aussi, vous procrastinez, si vous voulez que ça cesse, ça peut faire mal, et il faut faire preuve de discernement, ce qui n’est pas toujours simple. Mais c’est possible, si on se considère soi-même avec indulgence et bienveillance, et qu’on se rend compte qu’il n’y a pas une procrastination, mais des procrastinations. Ce qu’on a pu présenter comme « le mal de l’ère moderne », comme une plaie pour un grand nombre d’entre nous, n’est sans doute pas très différent de ce qui se passait avant. C’est simplement que nous sommes dans une société qui veut aller vite, alors tout retard se remarque, et quand on n’a pas envie d’aller vite (pour de multiples raisons), on peut procrastiner. Ce qui explique que le phénomène soit plus répandu et/ou plus intense qu’avant.
Quoi qu’il en soit, on peut le vaincre.

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