C’est cela
mon problème, depuis des mois, voire des années, et dans les
derniers mois, c’est également – entre autres, la raison pour
laquelle je n’ai pas écrit d’articles depuis un bon moment, et
je m’en excuse. Je ne vais pas dire que je vais mieux sur ce point,
ni sur aucun autre en fait, parce que ce serait en grande partie
faux. Je suis fatigué, mais moins, j’ai du mal à penser, mais
moins, et je procrastine, mais moins. Un tout petit peu moins.
Jusque-là, pas vraiment de quoi faire un article entier. Et
pourtant.
Ma principale
découverte date de ces derniers jours. Tout au plus une semaine.
Mais je vais d’abord vous replacer dans le contexte exact de ce
qu’était ma procrastination, parce que ce mot est un peu vague et
qu’il recouvre, comme beaucoup de mots, plusieurs réalités.
Remettre à plus tard
ce que l’on pourrait faire au moment-même, c’est cela,
procrastiner ; pourtant, il y a plusieurs causes à la
procrastination, et je crois profondément que des causes
suffisamment distinctes entraînent parfois une différence de nature
entre leurs deux conséquences, qui pourtant sont perçues, de
l’extérieur et avec un peu de distance, comme identiques.
Moi-même, je croyais que la raison pour laquelle je procrastinais
était tout simplement le fait que j’étais un flemmard. Mais en
réalité je ne crois pas l’être tant que cela. Les faits sont les
suivants : je fais les choses obligatoires, mais je fais le
minimum possible et le plus tard possible, si elles ne m’intéressent
pas ; si elles m’intéressent, je les fais consciencieusement,
minutieusement, même.
Dans le premier cas,
on pourrait dire que je procrastine par désintérêt, par désir de
ne pas perdre mon temps à des choses dont j’ai l’impression
qu’elles ne me servent à rien. C’est probablement ce que l’on
appelle communément la flemme.
Quoi qu’il en soit, je sais tout de même gérer plus ou moins bien
ce type de procrastination. Je peux par exemple me rendre compte que
reporter la réalisation d’une tâche m’apporte plus de
souffrances que de l’effectuer sur le moment. Pour les devoirs, par
exemple, je sais que si je ne les fais pas, il en résultera un
manque de compréhension du cours, une mauvaise appréciation du
professeur, un sentiment de honte très puissant, et d’autres
choses de ce genre. Cela se gère, donc. Même si ce n’est pas
forcément simple.
Mais
le second cas me semble plus intéressant. Je ne faisais pas mes
devoirs de français (alors que la littérature est pour moi une
passion), de physique (ce dont je veux faire mon métier), ou de
philosophie (ce qui est mon mode de pensée) avant tard la veille du
jour où il fallait les rendre, et je pensais que c’était dû au
même phénomène que dans le premier cas : j’avais la flemme,
je préférais faire autre chose, quelque chose de plus confortable,
qui me demandait moins d’efforts, en somme. Mais je me trompais en
partie : en fait, je ne ressens pas du tout la même chose quand
je n’ai pas fait un exercice de maths (qui me tient moins à cœur
que la physique) que de physique. Pour quelle raison ?
Précisément parce que les trois disciplines du français, de la
philosophie et de la physique sont les domaines dans lesquels
j’investis le plus de moi-même, et rendre un devoir que j’ai
moi-même fait, c’est de toute évidence me soumettre au jugement
d’une personne qualifiée en la matière, qui est capable de
briser, en quelques traits de stylo rouge, tout
espoir d’avoir un jour de la valeur dans ces domaines qui me sont
chers. J’ai peur que mes professeurs me disent que je suis
incompétent, alors faire leurs devoirs me terrifie, parce que ça me
rend vulnérable, alors le seul moyen que j’ai trouvé pour
surmonter cette angoisse, c’est d’être perfectionniste. Cela
demande une quantité assez phénoménale de temps et d’efforts,
d’être perfectionniste – en tout cas dans ma tête – alors
forcément, lorsque je pense à commencer un devoir, je me trouve
bien plus à l’aise sous ma couette à surfer sur internet. C’est
tellement plus facile.
Pourtant,
tout est dans ma tête. Je sais depuis un certain temps que je me
mets la barre tellement haut, parfois, que je
peux me permettre de ne pas atteindre cet objectif et avoir un
résultat reconnu de mes professeurs tout de même. La peur de leur
jugement est presque
entièrement irrationnelle.
Je me fabrique mon propre
obstacle, et je m’en rends compte une fois que je commence :
dès que je me lance, c’est parti, et on ne peut plus m’arrêter.
Il m’arrivait la même chose avec l’écriture (littéraire ou
d’articles) : j’ai tellement peur qu’on juge négativement
ce que j’écris que ça m’inhibe, et que j’ai beaucoup,
beaucoup de mal à m’y mettre. Mais
j’y prends pourtant énormément de plaisir, et je le sais. Je sais
que c’est mieux que de passer des journées à me morfondre sur
internet ou sur un jeu vidéo. Et
pourtant ça me fait souffrir. Le fond de la question était de
découvrir que c’était de commencer
qui me faisait souffrir, et pas de faire
réellement. Et de comprendre pourquoi ça faisait mal. Maintenant je
peux me battre.
Et conclure.
Si vous aussi, vous
procrastinez, si vous voulez que ça cesse, ça peut faire mal, et il
faut faire preuve de discernement, ce qui n’est pas toujours
simple. Mais c’est possible, si on se considère soi-même avec
indulgence et bienveillance, et qu’on se rend compte qu’il n’y
a pas une procrastination,
mais des
procrastinations. Ce qu’on a pu présenter comme « le mal de
l’ère moderne », comme une plaie pour un grand nombre
d’entre nous, n’est sans doute pas très différent de ce qui se
passait avant. C’est simplement que nous sommes dans une société
qui veut aller vite, alors tout retard se remarque, et quand on n’a
pas envie d’aller vite (pour de multiples raisons), on peut
procrastiner. Ce qui explique que le phénomène soit plus répandu
et/ou plus intense qu’avant.
Quoi
qu’il en soit, on peut le
vaincre.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire