Si ton esprit au
mien s’ouvre et veut se lier,
Si à tes yeux je
suis autre qu’un étranger,
Si ta promesse est
dite aux cieux assourdis,
Je te veux bien
livrer le secret qui m’emplit.
Ah, cruel ! Ton
mystère et ton jeu m’ont trompé :
Je voyais, intrigué,
ton cœur se dévoiler.
Aurais-je cru alors
à ta douce innocence ?
Ta comédie sincère
a trompé tous mes sens,
Et c’est confus
d’espoir que je me suis perdu
Dans tes
déguisements. Et que n’ai-je perçu
Sinon la vile erreur
qui suintait de mon cœur ?
J’ai bu ma propre
ardeur, et j’ai, pour mon malheur,
Imaginé trop fort
la passion qui t’anime.
Alors que ma passion
à cette idée s’arrime,
Le torrent de ta
nuit me fera renoncer :
Je sais tes
sentiments, je les ai observés.
Si en ce jour fatal,
sur les plis de mon âme,
Je me laisse glisser
vers la terrible lame
Que tu tends face à
moi, que j’ai forgée moi-même,
C’est que, soudain
lucide et libéré, je sème
Les graines de nos
liens que tu feras pousser.
Je renonce à
l’amour qui me fait soupirer,
Et pour toi au néant
j’ose m’abandonner ;
Le ciel noir,
déchiré, mais la terre remplie
De ponts sur les
ravins : voilà qui me suffit.
(Titre : citation de Racine, Andromaque, II, I, Hermione)
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