dimanche 29 septembre 2013

L'Engagement.

Je me suis souvent questionné sur l'engagement. D'ailleurs, à l'oral du bac, après que j'aie longuement parlé de La Beauté, de Beaudelaire, poème parnassien où il explore la tentation de "l'Art pour l'Art", et le rôle du poète, hier comme aujourd'hui, on m'a posé la question suivante :

-Pour vous, le poète doit-il s'engager ou non ?

Eh bien pour moi, oui, l'artiste doit s'engager, et c'est même une nécessité profonde, je pense. Sauf que par "l'artiste", j'entends "le cercle de tous les artistes". En fait, il m'est égal que chacun des artistes s'engage, ça n'est pas forcément nécessaire. Ce qui l'est, en revanche, beaucoup plus, est que, parmi tous ces poètes, tous ces sculpteurs, peintres, écrivains, architectes, chanteurs, musiciens etc., il y en ai au moins un qui s'engage. Plusieurs si possible, pour la diversité des pensées. Et dans chaque art, également, toujours pour la diversité. Parce qu'au fond, les arts ne sont pas tous accessibles, et pas tous au même niveau (on dira ce que l'on veut : il y a toujours 2 millions d'illettrés en France, et payer le musée pour voir un Van Gogh n'est pas à la portée de tout le monde). Mais ce n'est pas le sujet.

Certains auteurs sont d'accord avec moi, sur ce point. Ou plutôt : je suis d'accord avec eux. Question d'antériorité. L'engagement est un des rouages (que je considère comme) majeurs de la progression de la société. Qu'elle puisse tendre vers plus d'humanité. Au sens large du terme, c'est à dire, au sens d'acceptation et de respect de tous, y compris des animaux et des potentiels extra-terrestres. (Mais bon, ça a ses limites : que fait-on des bactéries qu'on tue à la javel, des cafards qu'on doit exterminer pour pouvoir vivre sainement, des moustiques qu'on doit écraser pour éviter le paludisme ? Honnêtement, les bactéries, je n'y pense pas, mais les autres, si, et maintenant, j'ai du mal à tuer un moustique ou une mouche...)

Cependant, là où ma pensée diffère de celle de Sartre, ou du moins de ce qu'on m'en a expliqué, c'est que pour moi, tout le monde n'est pas obligé de s'engager (Sartre fait dire à Oreste, en référence à sa liberté, c'est à dire, son absence d'engagement : "Ah comme je suis libre ! Et quelle superbe absence que mon âme !"). Je considère simplement, et cela n'engage que moi, que certains doivent le faire. Si tous le veulent (parce que, entre nous, tous le peuvent), alors tant mieux. Mais je suis lucide, et je sais que tout le monde ne veut pas s'engager, ne s'engagera pas. Et je sais aussi que l'on peut avoir d'autres considérations que celle de l'engagement. Or, je considère chaque homme comme totalement libre de ses actes, ses pensées et ses choix, aussi, exiger un engagement de la part de quelqu'un qui ne le veut pas, c'est exiger qu'il restreigne sa liberté contre son gré ; tandis que qui s'engage par volonté ne restreint pas, mais augmente sa liberté. Pour cela, je ne suis pas d'accord avec la vision de Sartre : on n'a pas l'âme vide tant que l'on ne s'est pas engagé ; tous les hommes sont égaux quels que soient leurs choix, et ils faut les respecter.

Respecter les choix autant que les hommes.

Edit du matin :
Chez moi, l'Engagement prend la forme particulière de la Diane, la batterie de tambours du lever du jour, jouée pour éveiller la ville. Parce que, un jour, alors que je venais d'écrire une série de poèmes, dont la plupart n'étaient pas engagés, alors que j'étais un Cosmogone à part entière, un "artiste", simplement quelqu'un qui tente tant bien que mal de faire de l'art. Et la Diane est arrivée. Comme une sorte d'évidence. Je n'avais pas le choix. Je devais m'engager.

5 commentaires:

  1. J'avoue que je tendais grandement à rejoindre la pensée de Sartre, à savoir que l'homme doit s'engager, parce que j'avais jamais envisagé qu'on puisse ne pas être engagé dans quelque chose.
    Cependant, si des personnes font le choix de ne pas s'engager, c'est encore un engagement. Comme l'apolitisme est une action politique.
    (je sais pas trop si je suis claire, mais, c'est le matin. Mon cerveau est encore brumeux.)(ceci est un appel à l'indulgence ^^)

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    1. Je suis d'accord, mais uniquement à partir du moment où le non-engagement est un choix volontaire. Parce que, au fond, ne pas choisir, c'est aussi un choix, mais je ne pense pas qu'on puisse parler d'apolitisme si jamais le choix a été pris par défaut... Parce qu'entre engagement et non-engagement, si l'on ne choisit pas, on ne s'engage pas.
      Ma question est la suivante : le non-engagement par défaut a-t-il la même valeur que celui choisi et réfléchi ?

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    2. Qu'est-ce que tu entends par non-engagement par défaut (là est ma question) ?
      Et l’apolitisme peut être un choix à la fois réfléchit, du genre "non, je ne prendrais pas part à la vie politique parce que je rejette la politique", ou juste ne pas s'y intéresser. Le résultat est, au fond, le même.

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    3. Quelqu'un qui ne sait pas s'il doit ou non s'engager, s'il le veut, etc. et qui, au lieu de choisir l'un ou l'autre, décide de ne pas choisir. "Je choisirai plus tard", ou je ne sais quoi. Dans ce cas, le choix est fait tout de même, par défaut : il ne s'engage pas.

      Et je suis d'accord, l'apolitisme réfléchi, ou l'absence d'intérêt pour la politique, tout cela revient au même. Sauf que cela n'a pas vraiment la même valeur politique. Je m'explique : l'apolitique réfléchi est au courant de la politique, des idées, de ce qui se passe, et, en connaissance de cause, décide de se retirer de la vie politique. L'autre ne rejette pas la politique : il ne s'y intéresse simplement pas. Dans le premier cas, on est en présence d'un acte contestataire, et je ne pense pas qu'on puisse dire que, dans le second cas, on le soit...

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    4. Bah, c'est pas vraiment par défaut, puisqu'il a la possibilité de s'engager. C'est juste plus simple pour lui de ne pas décider maintenant, mais il pourrait le faire.

      Ne pas s'y intéresser, c'est une forme de rejet, même si je te l'accorde, le premier est contestataire (un apolitisme réfléchit est donc un acte politique, en fait) et pas l'autre.
      En fait, ne pas s'engager, ça reste s'engager, mais d'une façon inconsciente.

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