mardi 23 décembre 2014

Reconsidering things

Les mendiants dans la rue. La guerre en Israël et Palestine. Les meurtres, les vols, les tueries, les attentats en tous genres. Nous sommes entourés par la douleur et la haine de toutes parts. Même au plus près de nous. Nous trouvons le moyen, pourtant, de nous plaindre pour des choses qui ne le méritent pas réellement - une mauvaise ligne de corps, un amour inassouvi ou détruit, un petit événement qui contrarie le déroulement lent, doux, mou, engourdi, léthargique de nos vies.
Nous disons souvent, pour justifier nos petits malheurs insignifiants, que ce n'est pas parce qu'un malheur est petit qu'il ne doit pas être pris en compte. Et c'est vrai. Vrai. Mais il y a une différence fondamentale entre une personne qui se casse un ongle et une autre, moribonde dans le froid des rues. L'urgence. C'est cela toute la différence, et ce qui fait que jamais, non jamais, on ne pourra justifier nos plaintes superficielles à nous, qui vivons bien, quand d'autres souffrent.

La Diane, allégorie de la nécessité de l'action, je me la représentais jusqu'à présent sous les traits d'une Athéna souriante dans une clinquante armure légère de fer poli scintillant. Mais la Diane ne sourit pas. Elle a le regard dur et sévère. Sa tenue porte les marques des coups d'épée qui lui ont été portée, elle se fait plus terne et plus sombre chaque jour. L'eau de ses yeux, si vous pouviez la saisir, est impétueuse, puissante, contenue mais déterminée. Elle ne se laissera pas faire. La Diane ne doit pas être celle qui chuchote légèrement aux oreilles. Elle est la messagère de l'urgence. Elle doit crier, elle doit faire retentir tambours et clairons, elle doit faire sentir sa clameur jusqu'au plus profond de nos êtres remués de fond en comble.

C'est aussi pour cela qu'il est insupportable pour un végétarien de voir un omnivore continuer à cautionner des meurtres qui détruisent la planète. C'est pour cela qu'il est insupportable à n'importe qui ayant vu la mort en face de taire son envie de faire cesser la souffrance. C'est pour cela que certains s'évertuent, par l'art, à tenter de diffuser ce sentiment d'urgence qui est la seule véritable clé de l'action, une fois qu'elle emplit pleinement la conscience.

Voilà la leçon que m'apporte Yasmina Khadra, avec son livre L'Attentat, en plus d'une foule d'autres apprentissages. Cet homme réussit si bien à mêler un art aussi parfait que le regard d'un nouveau né sur le monde ou le sourire d'un sage qui meurt serein (ce que tente d'atteindre mon Cosmogone), à l'exposition d'une situation qui transpire l'urgence, la douleur, la tragédie...





Ce livre ne montre pas seulement que l'art ciselé et la nécessité de l'action peuvent se mêler parfaitement et conduisent au joyaux les plus fins, il démontre aussi que la tragédie n'est pas que pour les rois, comme le soutient Anouilh, mais au contraire plutôt banale. Et il propose un exemple canonique de traitement impartial d'un sujet sensible. Je ne me sens pas investi d'un besoin d'aide ni envers Israël, ni envers Palestine, alors que c'est là le tableau dans lequel prend place l'action de ce livre. Les arguments, humains, avancés des deux côtés (qui en fait ne sont pas si simplement dessinés) sont tout aussi cohérents pour l'un que pour l'autre.

Je vous incite réellement à lire cette merveille littéraire, qui change en profondeur tout en procurant une joie profonde à la lecture. J'aimerais vraiment que nous, nous tous, reconsidérions les choses qui nous entourent et cherchions activement, ensemble, des solutions à ces divers problèmes, sans fatalisme, ce cyanure insupportable de l'engagement.

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